Prendre les bonnes décisions pour avoir la bonne influence, ça se travaille !

Par Marine BALANSARD

L’influence, alliée ou ennemie du décideur ?
« Attention à ces personnes qui ont une mauvaise influence sur toi… » Qui n’a pas entendu depuis l’enfance, ce type de mise en garde. La sagesse véhicule cette idée que nous serions influençables, et qu’afin de conserver notre libre-arbitre, il faudrait constamment veiller à s’extraire de certaines influences. Décider c’est exercer sa liberté.

Être sensible aux influences est un mécanisme de survie Prendre des décisions nécessite de s’appuyer sur des informations de sources différentes (faits, opinions, conversations, …) puis d’opérer un processus de tri et discernement. Le choix est toujours sous contraintes dans un contexte donné. Certaines influences sont recherchées activement, d’autres sont plus
subtiles, voire subies. Discerner la nature de l’influence est une première étape pour s’en détacher.
La publicité par exemple fournit de l’information au consommateur, rend un produit ou service désirable, de façon à déclencher une appréciation plus favorable menant à une décision d’achat. L’influence est bien quantifiée, l’influenceur identifiable. Il en va de même pour les lobbys dont l’influence est annoncée. L’influence est un peu plus diffuse lorsque les marques associent leur nom à des stades ou évènements sportifs par exemple. Par ailleurs, les bien-nommés « influenceurs » sur les réseaux sociaux semblent indépendants alors même qu’ils bénéficient de contrats avec des marques, et sont donc eux-mêmes « sous influence ». Ces points méritent d’être vérifiés, notamment lorsque l’on est confronté à des influenceurs puissants, tels que les « key opinion leaders », de façon à remettre en perspective
l’information. Dans l’environnement de décision, le « nudge », littéralement coup de coude, est un mécanisme d’influence destiné à orienter certaines décisions, « pour notre bien » (proposer en première ligne des légumes plutôt que des frites en restauration collective, ou devenir donneur d’organes par défaut). Ici le discernement s’opère à la façon d’un questionnement intérieur qui met en avant la possibilité du choix : ai-je toujours voulu être donneur d’organes ?

Le groupe, chef de file des influenceurs
Nombre d’études de psychologie sociale, dont celle de Salomon Asch dans les années 50, démontrent à quel point le regard des autres pèse dans nos décisions. Le conformisme, qui consiste à adhérer à la pensée et comportements du plus grand nombre, permet de créer de l’homogénéité pour pouvoir vivre ensemble. « Mieux vaut avoir tort avec les autres que raison tout seul » est un adage qui évoque cette puissance de l’influence du collectif. Ce dernier s’avère pourtant délétère lorsqu’il annihile toute pensée dissonante, particulièrement quand s’agit d’innover ou de décider dans un environnement complexe.

L’influence intérieure est essentielle chez le décideur Notre histoire personnelle, nos expériences, notre culture et nos croyances influencent profondément notre prise de décision. Les émotions, très personnelles dans leurs modalités et intensité, sont également des influenceuses en chef. Destinées à nous faire agir, elles nous trompent parfois, dans leurs excès. La solution réside dans notre capacité à les gérer, par exemple en développant l’intelligence émotionnelle. Enfin, pour reprendre le sociologue Andreu Solé, le décideur crée sa propre représentation du monde, sa « boîte noire » qui imagine les possibles, les non-impossibles et les impossibles. Le décideur est sous l’influence de celle-ci, il gagne à engager du dialogue régulièrement. Reconnaître la puissance de l’influence sur nos décisions est une
des conditions qui permet de reprendre le contrôle. Plutôt que de les minimiser, ou de surestimer notre capacité à y résister, mieux vaut les identifier et les challenger en multipliant les sources.
C’est la diversité des influences qui va permettre l’exercice du discernement afin d’engager des décisions éclairées.