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Vous souhaitez placer votre argent de façon utile et rentable… Avez-vous pensé à investir dans des entreprises d’avenir et qui partagent vos valeurs ? C’est le pari que vous propose Fabrice Delon. Il a développé Graines de Boss, une plateforme digitale mettant en relation investisseurs et startupers.
Propos recueillis par Christelle Crosnier et de Lisa Morelli
Christelle : Graines de Boss est-il une sorte de TripAdvisor des entrepreneurs ?
Fabrice : Nous avons commencé dans « Capital » sur M6 par une idée de concours de start-up que j’ai proposée il y a maintenant dix-huit ans à Nicolas De Tavernost, le Directeur Général de la chaîne; il avait été mon mentor. Je lui ai suggéré de réaliser ce qu’il avait fait pour moi à destination d’un plus grand nombre, en convaincant des cadres dirigeants de donner du temps et des conseils aux entrepreneurs qui se lancent. Ce concours a évolué et est devenu au fil du temps une plateforme de mise en relation entre entrepreneurs, cadres, dirigeants et investisseurs, comme un mix entre TripAdvisor et le modèle économique de LinkedIn. L’entrepreneur dépose son pitch, des cadres dirigeants mentors évaluent les projets avec des étoiles puis des investisseurs, fonds d’investissement, Family Office, Business Angels les consultent par secteur et par qualité. Par exemple : « Je ne veux voir que des start-up avec trois ou quatre étoiles dans le domaine santé ». Tout comme vous choisissez un restaurant sur TripAdvisor, vous regardez les avis, les étoiles et cela vous encourage à investir (ou pas !).
Christelle : Comment en êtes-vous arrivé à Graines de Boss ?
Fabrice : J’ai fondé une première société en 1991, qui proposait des logements aux étudiants français qui voulaient aller à New York pour de courtes périodes, car j’avais moi-même été confronté au problème. Puis j’ai monté un réseau d’affichage publicitaire sur les campus français. Je n’avais pas de relations à l’époque mais grâce à un concours que j’ai gagné, j’ai été mentoré par Nicolas de Tavernost qui m’a ouvert son réseau, ce qui m’a vraiment aidé. Je me suis alors rendu compte de l’importance du réseau et j’ai eu l’idée de créer Graines de Boss pour apporter du réseau à ceux qui n’en ont pas (et même à ceux qui en ont !). Le fait de faciliter les rencontres va permettre d’avoir de nouvelles idées, de se challenger et d’être bien conseillé.
Christelle : Vous dénichez ainsi les futures start-up montantes ?
Fabrice : Notre plateforme permet de digitaliser les projets. Mille trois cent quatre dirigeants et investisseurs spécialistes du secteur évaluent en ligne près de deux mille candidats, dont vingt-quatre lauréats. Total va plutôt évaluer des projets dans l’énergie, Carrefour dans le retail, L’Oréal dans l’hygiène et la beauté… Tous ces experts aident à cerner les pépites. C’est ça la magie du système. Un peu plus de sept cents millions d’euros ont ainsi été investis ces dix dernières années par des entreprises comme La Poste, France Télécom, Webedia, ou encore Urgo. Cela nous permet de détecter en amont de très belles start-up qui participent d’ailleurs parfois à l’émission « Qui veut être mon associé ? » sur M6. Nous organisons également des événements au MEDEF pour réunir entrepreneurs et investisseurs.
Christelle : Comment faire pour s’inscrire en tant que jeune entrepreneur ?
Fabrice : Cela s’adresse à des entreprises porteuses de projets, de moins de cinq ans, qui font peu de chiffre d’affaires (50 000 à 200 000 euros par an) et veulent plus de clients. L’objectif est que celui qui vous évalue, signe un contrat s’il aime votre produit. Nous visons donc des boîtes qui veulent accélérer commercialement et qui cherchent à lever des fonds. On peut s’inscrire gratuitement sur grainesdeboss.com. Vous obtenez une note automatique lors du dépôt de votre dossier pour voir le score de « maturité » de votre projet. Ensuite, vous avez un échange avec une personne de l’équipe. Si votre projet est validé, votre pitch devient visible auprès de l’ensemble de la communauté des investisseurs, que vous pouvez contacter cinquante fois par mois. Inversement, eux peuvent vous contacter indéfiniment. Vous pouvez aussi participer à nos events pour échanger avec eux, pitcher, trouver des clients et des investisseurs.
Christelle : Combien avez-vous d’investisseurs et de mentors, et dans quels domaines ?
Fabrice : Un peu plus de mille trois cent, dans tous les secteurs d’activité. Nous avons décliné Graines de Boss dans les villes sous forme de licence; à Rennes, Nancy, Nantes, Marseille, bientôt Toulon, Amiens et Rouen. Certaines plateformes comme grainesdeboss.marseille sont en cercle fermé car réservées aux entrepreneurs et acteurs économiques de la ville. Les gens s’imaginent que les pépites sont toujours à Paris, mais pas du tout ! Il y en a partout en province et même dans les petits villages. Il faut simplement les trouver ! L’objectif de la déclinaison locale de Graines De Boss est de dénicher des start-up dans des endroits inhabituels. Nous l’avons fait par exemple dans les Alpes Maritimes.
Christelle : Souhaitez-vous vous étendre de plus en plus à l’international, comme en Afrique et en Inde, où il semble y avoir un vivier intéressant ?
Fabrice : Oui, il y a déjà grainesdeboss.mauritius. Nous pensons que l’Île Maurice est un pont vers l’Afrique, où l’entrepreneuriat est très puissant comme au Rwanda, en Côte d’Ivoire, au Sénégal, etc. Nous allons essayer avec nos partenaires pour voir si cela a un intérêt de créer des hubs en Afrique francophone.
Christelle : Quelle est votre philosophie de vie ?
Fabrice : C’est tout simplement de me faire plaisir. Je passe mon temps à voir des patrons enthousiastes qui se prêtent au jeu, viennent aux événements, conseillent des entrepreneurs qui pensent que leur produit/service va révolutionner le monde. Je ne vois que des gens positifs ! Je n’ai jamais monté Graines De Boss pour gagner de l’argent, mais c’en est l’heureuse conséquence. J’ai toujours été curieux auprès des entrepreneurs et des inventeurs, je suis d’ailleurs membre du concours Lépine.
Christelle : Le message est-il d’oser entreprendre et investir ?
Fabrice : Oui ! En France, il y a quelques années, quand vous aviez échoué une fois, vous étiez blacklisté et vous ne pouviez plus faire de prêt ; vous étiez vu comme un amuseur et on vous regardait bizarrement lorsque vous vouliez remonter une boîte… Maintenant, nombreux sont ceux qui souhaitent créer leur propre société. Mon conseil est d’oser. Même si vous faites des erreurs, l’échec commence à être valorisé sur un CV. Le pire c’est de ne pas essayer. Faites ce que votre ressenti vous souffle de faire (et non pas ce que les autres attendent de vous). À la fin de la vie, le pire, c’est d’avoir des regrets.