PARTAGEZ L'ARTICLE SUR LES RESEAUX SOCIAUX
Militante féministe, la réalisatrice Bouchera Azzouz a été Secrétaire Générale du mouvement « Ni Putes Ni Soumises » avant de fonder son propre mouvement, le « Féminisme Populaire », qui se décline autour d’un programme d’accompagnement à l’autonomie des femmes mais aussi un travail de plaidoyer politique. Engagée auprès des femmes des quartiers populaires, elle reste convaincue qu’elles sont un vecteur puissant de la transformation de ces quartiers.
Propos recueillis par Christelle CROSNIER
Christelle : À travers vos écrits et vos films, vous interrogez la question de l’identité et des luttes systémiques pour l’égalité et l’émancipation des femmes…
Bouchera : Les événements de ma vie ont nourri une réflexion sur cette identité de femmes issues des quartiers populaires et de l’immigration arabo-musulmane, puisque la question religieuse vient aussi percuter cette question de l’identité. Je me suis intéressée à cette génération prise en étau entre la loyauté envers la famille, la culture et les traditions avec en même temps cette nécessité de trouver sa place dans une société encore lourdement frappée par la décolonisation notamment suite à la guerre d’Algérie. J’ai fini par comprendre qu’il fallait, à partir de cette réflexion personnelle entrer en résonance avec des luttes déjà organisées autour de la question de l’émancipation, de l’égalité femmes-hommes et de la conquête de cette égalité citoyenne au sens large.
Christelle : Pourquoi avoir fondé votre propre mouvement ?
Bouchera : « Ni putes ni soumises » est arrivé en 2002, quasiment vingt ans après la Marche des Beurres. C’était la première fois que la question des femmes des quartiers populaires faisait irruption dans l’espace public médiatique et politique. J’ai été piquée de curiosité sur ce mouvement d’ampleur qui venait percuter encore une fois la toile de fond de mon questionnement intime et personnel. En 2009, j’ai décidé de fonder mon propre mouvement car les femmes des quartiers populaires été souvent renvoyées exclusivement à l’oppression culturelle et religieuse, alors que de mon point de vue, il y avait une question importante qui venait se poser : la question sociale. J’étais dans cette quête d’intégrer des luttes systémiques pour l’égalité et la justice sociale.
Christelle : Qu’est-ce que le féminisme populaire ?
Bouchera : C’est d’abord dire que dans les quartiers populaires, il existe une dynamique émancipatrice extrêmement puissante portée par les femmes et qu’elle a besoin d’être soutenue, accompagnée et objectivée dans des politiques publiques d’envergure. La ghettoïsation est un frein majeur à l’égalité.